Jonathan Nubel
Le timbre baroque dans Medeamaterial de Pascal Dusapin

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Medeamaterial est une œuvre importante de Pascal Dusapin qui a été rejouée de nombreuses fois depuis sa création, mais c’est aussi une œuvre originale puisqu’elle confronte une écriture moderne à des instruments anciens. Dans cet article, sont examinés quelques aspects du timbre baroque – en particulier celui des créateurs de l’œuvre – dans le cours de la partition, pour conclure sur les notions même d’instrument et de timbre baroques questionnées par cette œuvre dans le contexte de la création actuelle.

François Delalande et Giovanni Antonini
Du timbre instrumental à la rhétorique de la « prononciation »

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Le « timbre baroque » n’est pas seulement le timbre des instruments. C’est aussi la manière dont on fait « sonner » ces instruments, par tous les artifices d’attaque, d’articulation, par la manière de « prononcer » le discours musical. On passe insensiblement de la recherche sur les instruments anciens, celle des luthiers, à une rhétorique baroque qu’ont retrouvée les interprètes et qui prolonge et explique la spécificité des instruments. Retrouver l’instrument est une chose, en retrouver le « mode d’emploi » en est une autre ; mais l’un ne va pas sans l’autre.
La recherche d’un « son » par les interprètes du baroque couvre ce spectre qui va de la lutherie à la rhétorique. De ce point de vue, les ensembles sont de véritables laboratoires de recherche, et l’un d’eux, le Giardino Armonico et son chef, Giovanni Antonini, sont exemplaires. Nous présentons des extraits d’un entretien qui ne prennent tout leur sens si l’on peut, comme ici, incruster quelques fragments de musique que commentent les dialogues .

Cet ensemble et son chef se sont rendus célèbres par leur interprétation de Vivaldi. La rencontre Vivaldi-Antonini pose à nouveau, mais avec une sensibilité très contemporaine, le problème de la fidélité. Antonini ne cesse de dire que les trouvailles sonores du Giardino Armonico sont déjà dans Vivaldi. Peut-être. Il est vrai que les pizzicati des violoncelles qui figurent la pluie dans l’Automne des Quatre Saisons sont bien notés fortissimo – ce qui est vraiment très étonnant – que l’alto qui fait le chien qui aboie dans le Printemps doit, pour être fidèle à Vivaldi, être joué « sempre fortissimo e strappato », c’est-à-dire « déchiré, arraché », ce qui est pour le moins surprenant. Il n’empêche que si j’ai été personnellement fasciné par cette interprétation et ai voulu en parler avec Antonini, c’est parce que « l’autorité du choix des sons », comme dirait François Bayle à propos des Variations pour une Porte et un Soupir m’a fait d’abord penser au Pierre Henry de ces Variations ou de Mouvement-Rythme-Etude : on entend trois « chaînes », comme on dit dans le milieu de la musique électroacoustique, fortement contrastées, plutôt que trois voix, en termes d’harmonie. Ce sont des morphologies sonores qui s’opposent. Ces contrastes, certes, sont typiquement baroques, mais ils rencontrent, par la plus heureuse coïncidence, une oreille typiquement contemporaine, celle de ces musiciens du Giardino, ensemble créé en 1985, qui n’ont jamais enregistré qu’en numérique ; une oreille formée à l’écoute du rock et des musiques du monde. Les attaques qui « décoiffent » ou les bruits concrets de frottements d’archets appartiennent à une esthétique sonore contemporaine, même si, incontestablement, comme le rappelle inlassablement Antonini, tout cela est déjà dans Vivaldi. C’est la grande trouvaille des interprètes du baroque : ils ont réussi à nous délivrer un « son » tout ce qu’il y a de plus actuel au nom d’une scrupuleuse fidélité au passé. Bien joué. C’est aussi, il faut le dire, ce qui nous a donné envie de consacrer un numéro de Musimédiane au timbre baroque…

Frédéric de Buzon
L’émergence du timbre dans la pensée musicale

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Au XVIIIe siècle, la théorie de la musique s’enrichit d’une propriété du son distincte de la hauteur, de l’intensité et de la mesure : il s’agit du timbre, évoqué notamment par le Dictionnaire de Musique de Jean-Jacques Rousseau (1768). La présente étude envisage les conditions théoriques sous lesquelles ce que l’on nomme (improprement) un paramètre a été exclu de la théorie pure de la musique au début de la révolutions scientifique et de la conception de la tonalité, puis en propose une approche irréductiblement empirique à partir notamment de la catégorie leibnizienne de clair-confus. Quelques remarques sur Arnold Schönberg s’articulent au propos.