La présence des ¼ de tons ne doit être considérée ici que du point de vue d’une altération du timbre.

Découpage formel


L’exemple 4 propose un tableau récapitulatif des minutages appliqués à chaque section, ainsi que leurs correspondances avec les tempi, la série des parités intervalliques et les accords parfaits. Selon ce même minutage, les quatre parties principales de Nachtmusik I durent respectivement 16’24, 4’19, 6’05 et 4’55, soit une durée totale de 31’43.

D’une manière générale, on peut observer que le compositeur dispose ses parties les plus imposantes lors des événements formels les plus significatifs. Ainsi, parmi les sections les plus longues figurent l’introduction, les sections 1, 29 (juste avant le changement d’accord parfait) et G, ainsi que la conclusion. Ici, l’utilisation spécifique des durées contribue à asseoir l’importance d’une partie ou à former un certain sentiment d’attente dans l’optique d’un éventuel renouvellement du matériau. Comme le montre l'exemple 5, ce sentiment d'attente est d'autant plus important que le compositeur a tendance à développer ses avancées mélodiques sur les sections les plus courtes. Ainsi, les sections les plus longue tendent à être moins dynamiques. Cette technique a pour principale vocation de mettre en avant les contrastes entre les différentes structures et articulations formelles.

Cependant, si j’ai découpé la pièce en quatre parties principales (cf. exemple 4) – suivant ainsi les indications de la partition – certains éléments formels peuvent tout de même être observés. Tout d’abord, l’introduction se détache clairement du reste de la première partie par une grande pause de 9 secondes, mais aussi par la résolution du premier accord de sept notes sur le do bécarre, ce qui provoque une rupture certaine. De même, si cette première partie est manifestement plus conséquente que les autres, elle propose néanmoins en son sein certaines respirations qui tendent à la subdiviser. Les deux respirations principales se situent juste avant la section 15 (p. 21 de la partition), et à la section 29 (p. 37). Bien entendu, les dispositions de ces respirations sont directement liées aux variations de matériaux et d’écritures qu'utilise Emmanuel Nunes. Les respirations correspondent notamment aux changements d’accords parfaits. Nous observons ainsi trois sous-parties qui peuvent être analysées de cette manière  (voir l'exemple 5):

  • 1a (14 sections) : présentation du matériau intervallique et rythmique, fixation harmonique sur l’accord parfait de si bémol mineur.
  • 1b (14 ½ sections) : augmentation progressive des avancées harmoniques et développements mélodiques des accords parfaits5, amplification et variation des idées initiales jusqu’à 29 (dispersions des développements mélodiques des accords à tous les instruments)
  • 1c (3 ½ sections) : conclusion partielle de la première partie, fixation harmonique sur l’accord parfait de si majeur, assouplissement du matériau et transition vers la section A.

Ce découpage formel permet notamment d’expliquer pourquoi la série d’accords parfaits est, a priori, si déséquilibrée. Les 42 sections numérotées se divisent en trois groupes, proposant ainsi trois états harmoniques différents (à titre indicatif, les exemples 1 et 2 font la synthèse des rapports entre les accords parfaits et les séries d’intervalles) ; une fixation sur si bémol mineur (sections 1 à 14) ; une évolution harmonique plus rapide en 4 accords parfaits (sections 15 à 29) ; une nouvelle fixation sur l’accord de si majeur (sections 29 à 32, puis sections 33 à 42).