La présence des ¼ de tons ne doit être considérée ici que du point de vue d’une altération du timbre.

Sections "lettrées"


Les accords de 7 et 8 sons

Les autres sections nommées par des lettres ont un rôle transitoire dans la pièce et sont nettement moins formalisées que les sections numérotées. L’introduction présente les notes constitutives de Nachtmusik I ainsi qu’un certain nombre d’écritures rythmiques spécifiques et récurrentes tout au long de la pièce. L’accord de 7 notes proposé par l’introduction se résout sur le do bécarre, qui est la seule note du complexe harmonique à ne pas s’inscrire dans un accord (parfait ou non). Ces mêmes rapports entre l’accord de 7 notes et le do bécarre sont réutilisés pour toutes les sections désignées par des lettres. Les seules exceptions notables se situent aux sections D, E et G. Pour les sections D et G, les accords se composent des 8 sons constitutifs de Nachtmusik I, incluant ainsi le do bécarre. A la section E, l’unisson d’octave sur le do bécarre est « altéré » par des glissandi en ¼ de tons alors que l’accord de 7 sons n’est présenté que par un simple trait de la clarinette basse (voir ci-dessous).

La figure ci-dessous détaille chacune des présentations de l’accord de 7 sons. Pour chaque présentation, le complexe harmonique est quasiment invariable. La fixation des hauteurs s’effectue de la même manière que pour les sections numérotées. Chaque présentation de l’accord propose un renversement différent avec des contrastes certains dus principalement aux ambitus et aux dispositions des intervalles qui composent ces mêmes accords. D’une manière générale, les associations de timbres proposent une nouvelle orchestration des profils sonores de ces accords, car ils ont déjà été largement présentés dans toute la première partie de la pièce ; il s’agit surtout pour le compositeur de régénérer le discours sans affecter la permanence du matériau harmonique initial. D’une certaine manière, ce renouvellement permanent de l’accord renvoie aux octaviations utilisées pour les intervalles constitutifs des sections numérotées. Nous retrouvons ici les mêmes techniques de développement déjà utilisées pour la série d’intervalles avec des octaviations et un travail sur les parités intervalliques.






Détail harmonique de l’introduction, des sections A à G et de la conclusion


Les 14 accords qui composent la conclusion se développent sur les mêmes techniques, mais détaillent quant à eux un élargissement de l’ambitus de manière plus directionnelle. Toute la conclusion se base sur l’accord parfait de mi bémol mineur auxquels viennent s’ajouter de manière ponctuelle un si bécarre et un fa bécarre. Par ces ajouts, Emmanuel Nunes renoue avec la parité entre les intervalles de seconde majeure et de septième majeure (si bémol /si bécarre, fa bécarre / sol bémol). La pièce se finit justement sur deux secondes mineures.

Tempéraments rythmiques des sections lettrées

Les conceptions rythmiques appliquées à ces sections détaillent, chacune, des « tempéraments rythmiques » particuliers. Ces tempéraments sont largement issus des sections numérotées précédentes (sections 1 à 32). D’une manière générale, les rythmes utilisés ici se composent de valeurs répétées, généralement issues des unités primaires des autres sections, tout comme les « modulations d’amplitude » utilisées lors des avancées mélodiques (cf. l’analyse de la section 11). On trouve néanmoins certaines cellules rythmiques plus caractéristiques. Par exemple, la cellule rythmique utilisée à la fin de la section C renvoie directement à celle utilisée pour la section 19 (cf. la partie d’alto) et pour l’introduction (cf. la partie de violoncelle, p. 2) :



Ce type de référence rythmique est largement employé. Néanmoins, la permanence des répétitions que ce soit d’une même valeur unitaire ou de mêmes cellules rythmiques tend à singulariser les sections A à F. Cette tendance à la répétition stricte et unanime des valeurs rythmiques va d’ailleurs se perpétuer dans les sections numérotées suivantes. Cette réinjection d’un même matériau rythmique permet à Emmanuel Nunes de confirmer cette permanence rythmique nouvelle dans les sections 33 à 42, faisant ainsi le lien entre les différentes parties de la pièce.