Conclusion

Il faut d'abord noter la spécificité de cette "expérience d'écoute" qui ne peut être généralisée à l'écoute des musiques électroacoustiques / acousmatiques en général, mais reste attachée à des musiques de type hörspiel, art radiophonique, musique anecdotique, "real-world electroacoustics" -- et qui plus est à des musiques présentant une temporalité bien particulière, liée à l'espace et à la verticalisation du temps. La principale limite du modèle se trouvant dans sa difficulté à rendre compte des formes complexes de musiques électroacoustiques et de musiques mixtes sans référentialité anecdotique évidente, c’est de ce côté que se trouve l’intérêt de futures recherches sur la réception et la perception de la musique acousmatique.

Rappelons aussi qu'il s'agit d'un travail d'étudiant en master, qui n'échappe pas aux limitations théoriques qui étaient les miennes à ce moment. De manière générale, le modèle tel qu’il a été présenté semble correspondre à une simplification (pire, à une objectivation, à une généralisation) de la réalité des processus d’écoute. Le développement de son aspect dynamique et multidimensionnel pourrait permettre de mieux comprendre les constructions des auditeurs à l’écoute d’œuvres acousmatiques.

Enfin, le biais d'interprétation qui consiste à supposer la contiguïté entre les processus de narrativisation apparents dans le discours et ces mêmes processus tels qu'ils se manifestent lors de l'écoute a été signalé en introduction. La méthodologie de ce travail ne permettait pas de dépasser ce biais, mais les résultats n'en sont pas pour autant hors de propos : il faut en fait considérer qu'ils constituent une trace à interpréter du regard rétrospectif d'un auditeur sur son expérience d'écoute.

Je poursuis actuellement le développement du modèle présenté ici dans le cadre d'une thèse de doctorat portant sur la dynamique de l'écoute (et par extension, sur l'expérience du temps) dans les musiques acousmatiques. Pour cela, la méthode de l'entretien d'explicitation semble extrêmement riche et pourrait permettre, en étant développée (et interprétée) correctement, d'obtenir des données précises sur le comportement d'écoute (qu'il soit plus ou moins actif et conscient) de l'auditeur.