Les chants parallèles de Luciano Berio par Laurence Bouckaert

3. Organisation des unités sonores perceptibles

3.1 Une grande forme en arche

La forme en arche

Organisés sous la forme d’une progression en arche, Les chants parallèles, avec un point culminant pratiquement au milieu, peuvent se scinder en trois grandes sections précédées d'une introduction et se terminant par une coda.

  Repère temporel Durée
Introduction
0 – 1’50
1’50
1
1’50 – 6’08
4’16
2
6’08 - 11’28
5’20
3
11’28 - 16’18
4’50
Coda
16’18 – 17’50
1’24

La durée de chacune des parties présente une certaine homogénéité, courte pour les extrémités et pratiquement équivalente pour les trois parties centrales.

3.2 D’une section à l’autre

L’introduction et la coda se répondent, rappelant à la mémoire ce qui a été énoncé au début. La voix chantée domine, sous forme de continuum sonore, ponctuée par quelques interjections vocales (eh, ah) et une série de glissandi, issu de la synthèse.

Exemple sonore N°1 : introduction - durée:1'52 Exemple sonore N°2 : coda - durée: 1'24

3.3 Entre les deux bornes….

Entre ces deux bornes, une grande partie centrale progresse sur le mode tension/détente. Trois sections se dégagent.
Elles s’articulent toutes sur le même principe : un continuum sonore réalisé à partir de la voix chantée, sur lequel des éléments discontinus de synthèse sonore se détachent.
Deux catégories :
En couleur jaune claire, on entend des sons plutôt dans le registre aigu et pauvre en harmoniques, dessinant quelquefois de courts motifs mélodiques.
À l’inverse, la seconde catégorie, plus riche en harmonique, met en avant des évolutions morphologiques avec des timbres aux sonorités plus rugueuses.

Exemple sonore N°3 : première partie - durée : 4’16

Exemple sonore N°4, seconde partie - durée : 5’20

Cette partie marque le point culminant Des Chants parallèles, avec la présence de l’extrême aigu du spectre ainsi qu’une densification et une agitation de la matière.
Elle est la plus longue de toute la pièce, laissant ainsi la place au développement maximum des morphologies des sons de synthèse.

Exemple sonore N°5, troisième partie - durée : 4’50

Elle se caractérise par l’apparition des “ sons rebonds “. Ils ont pour fonction d’adoucir les tensions, en guidant l’auditeur vers la coda. Le matériau de synthèse progresse sur le mode de la raréfaction.

3.4 Premiers résultats

La description de chacune des parties montre un point essentiel au niveau de la fonction musicale des deux catégories sonores : les sons issus de la synthèse assurent l’articulation entre les parties, ainsi que l’évolution générale autour du schéma tension/détente.
Le bourdon, lui, est posé, telle une continuité ininterrompue tout au long des trois parties. Ce sont les variations de nuances des sons de synthèse, qui, par effet de masque, le rendent plus ou moins présent.

Exemple sonore N°6, masque 1 à 1’03 - durée : 15”

Ce premier exemple, pris au début de la pièce (à 1’03), évolue depuis une occultation presque complète du bourdon, vers plus de présence lorsque la dynamique des autres éléments diminue franchement.

Exemple sonore N°7, masque 2 à 6’19 - durée : 26”

Ici, à 6’19 du début, l’effet de masque se fait très discret. L’occupation du sonagramme s’ouvre vers l’aigu, soit la zone opposée à celle du bourdon. Le chevauchement est alors plus difficile.

Exemple sonore N°8 : masque 3 à 7’05 - durée : 4”

À l’inverse, une poignée de secondes plus loin (à 7’05), les sons de synthèse recouvrent presque entièrement ce bourdon. La bande passante des éléments de synthèse prend le dessus.

Exemple sonore N°9 : masque 4 à 11’59 - durée : 10”

Enfin, dans ce dernier exemple, à 11’59, les “sons rebonds“ jouent à cache-cache et laissent apparaître par intermittence le bourdon, stable, continu et lisse.

 

Partie précédente - Sommaire - Partie suivante