2.3.1. Identifications

Nous commencerons par l’analyse des degrés d’identification et de nomination des unités perceptives. Il faut souligner que la non-identification d’une unité dans la production verbale ne signifie en rien que cette unité n’a pas été perçue, mais peut être un indicateur que l’unité en question n’a pas eu un impact fort et n’a pas joué de grand rôle dans l’interprétation formelle de l’extrait par l’auditeur. Même cette indication n’est pas certaine, car l’absence de signalement d’une unité perceptive par un sujet peut voir cette unité regroupée sous d’autres dénominations (« son musical » pour les « cloches », désigne aussi parfois les voix chantées), ce qui est regroupé ici sous l’appellation « autres ».

Les graphes ci-dessous représentent la répartition des identifications selon l'expertise, le groupe (avec ou sans mesures en temps réel) et l'occurrence d'écoute (1e ou 2e).

 

 

Si, pour le « bébé », un des sujets (pour des raisons personnelles) n’a réalisé l’identification qu’à la deuxième écoute, ce n’est en revanche pas le cas des « cloches » et du « souffle », qui sont identifiées ou non dès la première écoute. Par ailleurs, l’absence d’identification du « bébé » est commune à toutes les unités perceptives pour le sujet aE2, qui n’a en fait identifié les unités que par leur contraste de masse et n’a évoqué la possibilité de reconnaître des voix humaines qu’après la deuxième écoute et en insistant sur le côté anecdotique donc non-musical (d’après lui) de ce genre de qualifications.

Il a été impossible de contrôler certaines identifications comme étant celles du « gong » (différencié des « cloches » uniquement par un sujet), notamment lorsque les sujets parlaient de « sons de percussions-résonances », « métalliques », etc.

L’expertise ne semble pas être un facteur significatif dans les processus d’identification, tandis que l’appartenance à un groupe ou un autre est nettement plus marquante. L’influence des mesures en temps réel et des jugements sémantiques semble donc être tout à fait significative sur la production verbale des sujets.

***

L’analyse des noms donnés à chaque unité perceptive montre des prédominances claires selon l’expertise des sujets. Le nom donné diffère de la qualification adjectivale de la même manière que la « caractérisation » sémantique diffèrera de la « valeur » sémantique à travers une conscience et un détachement plus grand de la part des sujets dans le deuxième cas que dans le premier.

Le « bébé » est très nettement humanisé, tandis que c’est l’aspect « référentiel », instrumentalisé qui semble dominer dans les dénominations des cloches, bien que nous verrons avec l’analyse des qualifications qu’il n’est pas toujours dominant dans les perceptions.

 

 

Dans le cas du « souffle », la différence entre experts et non-experts s’exprime fortement, confirmant une orientation plutôt identificatrice pour les non-experts, plutôt qualificative pour les experts. De manière assez intéressante, le « souffle » est appelé « son » par une majorité de sujet du groupe témoin, tandis que ce sont plutôt des sujets du groupe expérimental qui l’appellent « bruit », pouvant peut-être suggérer une certaine « indésirabilité » de ce son dans le cadre de la tâche de mesure.
Pour ce qui est du « chant », l’aspect humanisé est nettement moins présent que dans le cas du « bébé », même si l’on verra des rapports anecdotiques dans lesquels le « chant » devient marqueur d’une présence humaine.

 

 

Les unités perceptives « escalier » et « papier » trouvent leur similarité dans les dénominations qui leur sont données avec les thèmes « quelqu’un » et « bruit ». Le premier est celui qui marque l’apparition d’un humain dans la dénomination du son, dénotant une forme de « matérialisation » qui sépare la voix des sons produits intentionnellement et de ceux qui résultent d’une action dont ils ne sont pas le but (ce qui est d’ailleurs possiblement à l’origine du second thème, le « bruit »).

 

 

Le « battement de cœur » et l’ « horloge » reçoivent tous deux principalement leurs noms référentiels, tandis que l’identification référentielle la « voiture » est beaucoup moins évidente qu'on aurait pu l'imaginer, sa valeur abstraite et/ou rhétorique semblant tout à fait pouvoir prendre le dessus dans le discours, si ce n’est dans la perception, des auditeurs.

 

 

 

Page précédente - Page suivante