Composition, interprétation et figuralisme dans la musique du عود (‘ûd) [luth arabo-oriental] de concert
Analyse auditive de l'abri d'al-Amiriyya de Naseer Shamma

Hamdi Makhlouf

Introduction

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3.1

Chapitre 3.2

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Conclusion

Références

Translittération

1. L'analyse auditive : quelles évidences ?  
   

« Comment faire une analyse auditive qui ne soit pas subjective ? Cette question sous-entend que la subjectivité n’est pas scientifique. Et il faut questionner le "fait d’art" sous cette lumière trouble. » [6]

 

Une question, une constatation et une problématique. Cette citation, au cœur même de l’objet "analyse", interpelle directement la scientificité d’une entreprise méthodologique relative à l’art ; à la musique en l'occurrence. Sur les niveaux les plus bas, bases de la construction des piliers d’une analyse auditive, deux éléments sont mis en relation directe : l’analyste et le matériau analysé. Cette relation paraît évidente d’emblée. Il suffit de la "poncer" pour découvrir que les paramètres qui la régissent ne sont pas, quant à eux, évidents. L'analyste, émanant d’une certaine culture, est soumis, par défaut, à un champ auditif permanent qui lui permet de construire une représentation musicale du matériau sonore. L’analyste est, dans cette circonstance, un auditeur expérimenté dont l’analyse se transforme en un processus d’évaluation schématique mentale [7] du matériau sonore. Une part de subjectivité est dès lors inéluctable. D’un autre coté, l’analyse dépend fortement du contexte ou du support du matériau musical en question. Un document audio-visuel rapporte plus d'informations sur l’événement musical qu’un document sonore. Ce dernier, concernée, en toute vraisemblance, par l’analyse auditive, est étroitement lié à l’événement musical écouté. Par conséquent, d’autres paramètres doivent être pris en considération : de quel support s’agit-il ? Est-ce une musique en temps réel ou une musique montée ? Y a-t-il des effets sonores rajoutés au signal de base ? Quel cadre attribuons-nous à l’analyse en présence de toutes ces conditions ?

[6] CHOUVEL Jean-Marc, « Una Analisi Uditiva. Round de Luciano Berio », Rivista di Analisi e Teoria Musicale, LIM Editrice srl, Lucca,  2006, pp. 129-141

 

 

 

 

[7] Terminologie empruntée à Mondher Ayari et Stephen McAdams, « Le schéma cognitif culturel de l’improvisation modale arabe : forme musicale et analyse perceptive », Observation, Analyse, Modèle : Peut-on parler d’art avec les outils de la science ?, Textes réunis par Jean-Marc Chouvel et Fabien Lévy, Les cahiers de L’IRCAM, L’Harmattan, Paris, 2002, p. 396

 

 

Le fait d’aborder toutes ces évidences remet en question l’outil principal de la compréhension de la musique. L’analyse, structurellement et formellement saillante, ne peut trancher le dynamisme de la musique et son caractère mou et insaisissable. C’est ainsi que l’"auditif" intervient, avec sa part de subjectivité tirée du "fait d’art", pour redonner à l’analyse une marge de manœuvre scientifique basée sur « une expérience toute particulière qui tient à la rencontre de deux singularités : celle d’un auditeur et celle d’une oeuvre. » [8]

[8] Chouvel rajoute qu’ « Au fond, on pourra dire que l’analyse auditive que nous avons menée est une parfaite illustration de cette singularité : c’est l’analyse de Rounds de Luciano Berio, par Jean-Marc Chouvel. » Op. Cit.,