Composition, interprétation et figuralisme dans la musique du عود (‘ûd) [luth arabo-oriental] de concert
Analyse auditive de l'abri d'al-Amiriyya de Naseer Shamma

Hamdi Makhlouf

Introduction

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3.1

Chapitre 3.2

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Conclusion

Références

Translittération

Conclusion  

 

 

La musique arabe, et en particulier celle du عود (‘ûd) de concert de la fin du XXème siècle, mérite d'être analysée dans toute sa complexité. L’objet de cet article est de mettre en évidence un nombre considérable d'aspects qui ont été fort peu abordés dans les analyses précédentes. En donnant la prépondéronce à l'écoute, plusieurs correspondances ont pu être dégagées entre l’analyse formelle et l'exploration d’une pensée compositionnelle. Le choix de L'abri d’al-Amiriyya de Naseer Shamma renvoie aux métamorphoses que le عود (‘ûd) a nettement subi sur les plans de la composition et de l’interprétation. Les niveaux de segmentation abordés au cours des lignes précédentes ont mis en valeur quelques manières de "voir" l'œuvre en question ; certes différentes mais éventuellement complémentaires quant à la conception du compositeur.[20] L'analyse auditive a permi de mettre en évidence des aspects fondamentaux de l'œuvre de Shamma. Malgré la part de subjectivité inhérente à cette approche, nous parvenons à réaliser une interprétation concrète de la réalité compositionnelle et interprétative. En outre, la complémentarité dégagée entre la forme d'onde et la vue spectrale de l'œuvre constitue un résultat analytique important qui nous a permi de mettre en valeur la manière dont les éléments compositionnels sont régis.

[20] Une confrontation de l'analyse musicale dans cet article avec le point de vue de Naseer Shamma serait d'une grande utilité pour confirmer ses intentions compositionnelles exactes.

 

 

La spécificité sémantique de cette pièce nous a amené à évoquer d'autres éléments de l'ordre du para-musical. L'étude du contexte et des circonstances compositionnelles s'est avéré d'une extrême utilité dans l'établissement d'un rapport direct avec certains aspects formels de l'œuvre. Qui plus est, l'interprétation instrumentale de Naseer Shamma renforce la spécificité émotionnelle liée à ce contexte. Le deuxième niveau de segmentation a été réservé à la partie la plus tendue de l'œuvre en terme de déploiement spectral de l'énergie (selon la fig.4). Dans cette partie, Shamma procède à une nouvelle technique d'interprétation basée sur la valorisation du timbre de son instrument. L'aspect mimétique de certaines séquences (sons d'hélicoptères ou sons de bombardements) mène à un figuralisme musical qui reflète le contexte narratif de l'œuvre. Dans la méditation musicale arabo-orientale, l'abstraction de la musique instrumentale n'est pas du même poids que le « verbal » de la musique chantée. C'est ainsi que le figuralisme intervient pour donner de l'équilibre en remplaçant le « verbal » par un « imaginaire » stimulé par une image sonore. Le figuralisme constitue une forme d'expression artistique qui parvient à établir un fil conducteur entre la musique et l'auditeur et à diffuser ainsi un message porteur d'un sens bien défini. C'est une expérience fascinante pour ses deux protagonistes : celui qui la produit et celui qui la subit. La fascination est en relation directe avec l’événement musical dans son état concret. Son commencement est déterminé par le premier geste musical ou la première note prononcée. Son achèvement se prolonge toutefois dans une résonnance émotionnelle et méditative qui déborde celle de la dernière note émise par l'instrument.